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Faut-il composter le fumier avant de l’épandre?

par | Sep 9, 2022 | Blog, Radio Carbone

Soil Capital est régulièrement questionné sur la faisabilité agronomique de certaines pratiques agricoles bénéfiques au bilan carbone d’une exploitation. Le sixième épisode du podcast Radio Carbone est consacré aux apports de produits organiques, levier d’amélioration significative du bilan carbone d’une parcelle agricole, mais dont les formes (fumiers ou composts dans cet article) et les effets sur le sol (stockage de matière organique et stimulation de la vie du sol notamment) peuvent être très variables. 

Question de Xavier en Haute-Marne: ai-je intérêt à composter mon fumier avant de l’épandre?

Xavier, agriculteur en Haute-Marne (52, Région Grand-Est), est engagé dans le programme carbone Soil Capital. Il nous a sollicité dans sa réflexion pour savoir si l’épandage de fumier frais est le meilleur moyen de valoriser la matière organique qu’il a à sa disposition, en termes de bénéfices agronomiques, ou s’il ne serait pas plus avantageux de le composter. En agriculture biologique, Xavier épand actuellement du fumier équin et bovin frais sur ses parcelles.

Recommandations de Celesta-lab vis-à-vis du compostage des fumiers

En partenariat avec Icosystème, Thibault Déplanche, directeur du laboratoire Celesta-lab*, répond à Xavier en soulignant que chaque type de produit organique comporte des avantages et inconvénients, et que le choix de l’un ou l’autre dépend de l’objectif agronomique poursuivi.

*Laboratoire spécialisé dans l’analyse, l’étude et le conseil en biologie des sols et valorisation des produits organiques

Bénéfices et risques des composts et fumiers

Thibaut explique que le compostage permet d’obtenir un carbone très stable, car les formes carbonées digestibles (facilement minéralisables) ont été consommées sous forme d’activité biologique (et donc de production de dioxyde de carbone – CO2) pendant le processus. Cette perte du carbone digestible est la raison pour laquelle on constate une réduction de volume d’un fumier composté. Par conséquent, l’apport de compost aura pour principal effet l’enrichissement du sol en carbone stable, et donc le renforcement du stock de matière organique à long-terme.

L’effet d’un apport de fumier frais est double: il constitue un apport de carbone stable similaire au compost, mais est également une source de carbone digestible qui va nourrir la biologie du sol et stimuler les micro-organismes. Cependant, le fumier frais a une “plage d’utilisation” plus faible que le compost, car il est plus difficile à épandre, et comporte des pathogènes et graines d’adventices que le processus de compostage permet d’éliminer (hygiénisation par la montée en température).

Fumier composté Crédit : Matthieu Delespesse, août 2022

Choix du produit en fonction de l’objectif

Si l’on cherche à augmenter rapidement la teneur en matière organique stable du sol, Thibaut recommande d’apporter du compost, car il est peu risqué et peut être apporté en grandes quantités. A titre de comparaison, un apport de 50 tonnes par hectares (t/h) de compost peut facilement être envisagé (à condition d’avoir les ressources financières), tandis qu’épandre 50 tonnes de fumier frais peut être beaucoup plus risqué, en fonction de la teneur en paille et de la fragilité des sols.

Par contre, si l’on cherche à stimuler la vie du sol et à améliorer la structure à très court terme, un apport de fumier frais est plus opportun. En ce qui concerne la quantité à apporter, Thibaut indique qu’un apport de 20 t/ha permet de minimiser les risques. Dans le cas particulier de la ferme de Xavier, dont les sols sont riches en matière organique (5%), “on a probablement plus de résilience qui permettrait de monter à environ trente à quarante tonnes sans rencontrer de grosses problématiques”. Cependant, dans un contexte d’agriculture biologique où la fertilisation azotée est plus compliquée à maîtriser, Thibaut limiterait les apports de vingt à trente tonnes.

Choisir son objectif agronomique 

Pour Thibaut, le choix entre un fumier et un compost est tout d’abord une question d’objectif agronomique. 

  • Si l’objectif est d’augmenter rapidement le stock de matière organique sans prendre de risques, le compost est à privilégier. 
  • Si une stimulation de l’activité biologique est également recherchée, l’apport de fumier est plus indiqué. Dans ce cas, il est important de réfléchir sur les quantités à épandre en fonction de la résilience du sol et des caractéristiques du produit (notamment la teneur en paille pour son influence sur le C/N et l’épandabilité du fumier).

Légende première image : Fumier de bovin épandu pour des chaumes de céréales. Belgique. Crédit : Matthieu Delespesse, août 2022

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